Handicap et spatialités en temps de confinement

Dans un article paru le 25 janvier (La Covid au prisme des minorités vulnérables), deux membres du rhizome, Enka Blanchard et Zacharie Boubli, s’associent à Charlotte Lemaistre afin de décrire le rapport à la pandémie de certaines personnes vulnérables, en particulier celles en situation de handicap.

Le confinement a en effet révélé des parallèles multiples entre les nouvelles contraintes de la vie quotidienne et l’expérience passée de nombreuses personnes handicapées. Cela va de l’impossibilité de sortir de chez soi (pour les incapacités motrices) aux précautions hygiéniques et à la peur de sortir pour les personnes soufrant d’hypersensibilité chimique multiple. Alors que le partage d’expérience renforce la visibilité de ces communautés, elles restent d’autant plus vulnérables dans ce nouveau monde. S’il s’agit dans certains cas de corrélations et d’effets imprévus ou impossibles à corriger instantanément, il est important d’avoir conscience que cette plus grande vulnérabilité à la pandémie résulte aussi souvent de choix politiques délibérés, voire d’idéologies mortifères.

Ces travaux s’inscrivent au sein d’un projet plus vaste mené par Enka Blanchard sur la relation à l’espace des personnes handicapées. Un premier article paru sur EspacesTemps.net (Spatialités et temporalités du handicap I : des corps discrets dans un monde discret) avait analysé comment le handicap peut affecter non seulement les déplacements (comme illustré sur la figure ci-dessous) mais aussi la perception de l’espace et du corps plongé dans celui-ci. Le sujet handicapé se retrouve alors un acteur étrange dans un espace où de nombreuses discontinuités deviennent beaucoup plus visibles à l’échelle humaine. Dans le cas extrême, l’espace se retrouve entièrement discret, composé de points-lieux où l’individu existe sans avoir la liberté d’explorer le monde vaste interstitiel. Au-delà du rapport à l’espace, le rapport au temps peut lui aussi se retrouver discrétisé. Un deuxième article avait justement formalisé certains de ces aspects temporels en formalisant les coûts temporels auxquels font face les personnes en situation de handicap (Spatialités et temporalités du handicap II : une typologie systématique des taxes temporelles).

Ces réflexions ont enfin un aspect politique, avec la publication d’un article de vulgarisation en décembre 2020 sur les relations entre les communautés handicapées et les disciples de la collapsologie, dans un contexte où les discours écofascistes se font de plus en plus visibles (Crips, les oubliés de la collapso, Yggdrasil n°7, 16 décembre 2020).

Carte isochrone montrant le temps nécessaire pour atteindre différents endroits de Paris à partir du centre du XIème avec quelques contraintes : 30 minutes de batterie en fauteuil électrique, et utilisation des réseaux ferrés accessibles uniquement.

Carte isochrone montrant le temps nécessaire pour atteindre différents endroits de Paris à partir du centre du XIème avec quelques contraintes : 30 minutes de batterie en fauteuil électrique, et utilisation des réseaux ferrés accessibles uniquement.

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