"Co-construction dans les démocraties délibératives ... ", mini-publics et conventions citoyennes, retour sur pratique avec une publication co-signée par Ana Póvoas

La Convention Citoyenne sur la Fin de vie est une nouvelle occasion française d’exercice citoyen proposé dans une démocratie délibérative à et par un “mini-public”. Retour sur pratique avec l’analyse de celui de la Convention Citoyenne pour le Climat (CCC) à laquelle le rhizome a participé, avec cet article cosigné par Ana Póvoas et publié en juin 2022 par Humanities and Social Communication pour Nature.com :

“Co-construction” in deliberative democracy: lessons from the French Citizens' Convention for Climate

Entre octobre 2019 et juin 2020, 150 citoyens tirés au sort se sont réunis pour définir des mesures de réduction d’au moins 40 % des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2030 (par rapport à 1990) dans un esprit de justice sociale. Leurs propositions ont contribué à la préparation de la loi « Climat et Résilience ». Une trentaine de chercheurs issus de différents milieux (thématiques, méthodologiques, géographiques) ont observé les travaux des membres de la Convention. Cet article propose une synthèse descriptive de ces travaux, ainsi que les premiers résultats sur l’apport démocratique de cet exercice qui était en 2029 inédit en France.

 
 
... Les assemblées de citoyens et la co-construction partagent le même objectif d’accroître la qualité démocratique. Elles diffèrent néanmoins sur deux points importants, qui fournissent les questions de recherche menant à notre analyse. Premièrement, une sorte de primauté des citoyens prévaut dans les assemblées de citoyens. L’apport extérieur (d’experts en particulier), bien qu’autorisé, est limité au strict nécessaire. En revanche, dans le cadre de la co-construction, le résultat peut être d’une plus grande conséquence, mais la responsabilité de ce résultat est plus ou moins partagée - ou diluée, comme certains le soulignent (Steen et al., 2018), entre les citoyens et l’État.
Qui peut donc être tenu responsable du résultat d’une assemblée citoyenne co-constructive, comme on le demande à la CCC ? Deuxièmement, alors que la co-construction ne précise pas comment les citoyens sont impliqués, les assemblées de citoyens sont globalement structurées autour d’un processus de sélection. D’une part, cela permet de répondre à une critique courante selon laquelle la co-construction n’est pas nécessairement inclusive et représentative de la diversité des citoyens (Brandsen et al, 2018 ; Verschuere et al., 2018 ; Steen et al., 2018). D’autre part, elle trace une ligne claire entre les participants et les non-participants, alors que la ligne est plus floue avec la co-construction. Quel rôle les non-participants (c’est-à-dire le grand public) peuvent-ils jouer dans une démarche de co-construction citoyenne ?

La réponse à ces questions nécessite un examen approfondi et complet de la procédure et de son contexte plus large. Dans la section suivante, nous décrivons le protocole de recherche que nous avons mis en œuvre pour y parvenir. “
— In. Giraudet, L. G., Apouey, B., Arab, H., Baeckelandt, S., Bégout, P., Berghmans, N., ... & Tournus, S. (2022). “Co-construction” in deliberative democracy: lessons from the French Citizens’ Convention for Climate. Humanities and Social Sciences Communications, 9(1), 1-16. (Traduction libre et deepl.com)
La CCC a été la pièce centrale d’une séquence de trois ans d’événements politiques qui ont secoué la politique climatique française, de la crise des Gilets Jaunes au Grand Débat National, en passant par une nouvelle loi adaptant certaines propositions de la CCC. Ses travaux ont été sérieusement
perturbés par des conflits sociaux nationaux et une pandémie mondiale.
Dans un tel contexte défavorable, la plus grande expérience à ce jour d’assemblées climatiques a débouché sur un résultat contenant pas moins de 149 mesures, dont certaines pourraient changer la donne pour la politique climatique de la France. Si l’on peut dire que les travaux de la CCC ont créé
une dynamique politique, en raison de l’intense activité parlementaire qu’elle a suscitée, le suivi est en fait assez limité - à la déception des citoyens.
À la lumière de ses caractéristiques spécifiques, que que pouvons-nous apprendre de cette expérience ?
— Giraudet, L. G., Apouey, B., Arab, H., Baeckelandt, S., Bégout, P., Berghmans, N., ... & Tournus, S. (2022). “Co-construction” in deliberative democracy: lessons from the French Citizens’ Convention for Climate. Humanities and Social Sciences Communications, 9(1), 1-16.
 

"Dans une série de 58 votes, ils (les citoyens) ont ensuite été invités à évaluer l'ensemble du processus et le suivi du gouvernement (sur une échelle de 0 à 10). Comme l'illustre le tableau 4, ils ont jugé sévèrement les résultats (Q1 et Q2), avec des notes comprises entre 2 et 3. Dans le Q1 ainsi que dans de nombreux autres votes par mesure (CCC, 2021), un bloc d'environ 20 bulletins a voté zéro, quel que soit le degré de suivi qui avait été évalué par les groupes consultatifs, ce qui suggère que certains citoyens ont voté stratégiquement pour exprimer une forte désapprobation. En revanche, les citoyens ont exprimé des sentiments positifs à l'égard des assemblées de citoyens en général (Q3 et Q4)."

In. Giraudet, L. G., Apouey, B., Arab, H., Baeckelandt, S., Bégout, P., Berghmans, N., ... & Tournus, S. (2022). “Co-construction” in deliberative democracy: lessons from the French Citizens’ Convention for Climate. Humanities and Social Sciences Communications, 9(1), 1-16.

 

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