Chôros

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Une réponse de Shin Koseki

Une réponse de Shin Koseki :

“ Tout d’abord, même si la chose peut paraître évidence, j’aimerais revenir sur l’utilité d’une telle métrique. Là-dessus, Jacques a certainement son propre avis, mais pour moi, le peuplement effectif des lieux permettrait de mieux répondre aux exigences de durabilité, et notamment en ce qui a trait à l'allocation de ressources financières, matérielles et énergétiques. Dans une certaine mesure, connaître le peuplement effectif des lieux accompagne donc une démarche de justice spatiale centrée sur l’individu dans sa multilocalité, plutôt que limité aux fonctions (patriarcales) du lieu de résidence et du lieu de travail. Bref…

Je pense que la piste de Orange proposée par Albane est assez bonne, puisque aujourd’hui, on retient essentiellement trois types de « traces numériques » qui permettent de suivre de manière plus ou moins précise la multilocalité des individus. La première, c’est bien évidemment les données issues du traçage des téléphones portables par les antennes de relais. Le second, très lié au premier, consiste au traçage des données de connection wifi. Le troisième, de plus en plus utilisé dans la recherche est le traçage des dépenses par cartes bancaires. Ces trois sources de données sont aujourd’hui amplement utilisées en « sciences sociales computationnelles » sur des questions de transport, habitudes de consommation, santé, inégalités sociales et ségrégation.

Une quatrième source de traces numériques qui n’est pour l’instant pas encore exploitée à ma connaissance pourrait être issue des technologies de « contact tracing » telles qu’elles ont été mises en place pour lutter contre la COVID. Le déploiement de cette technologie à grande échelle est, comme vous le savez, très récent, et les différents acteurs du domaine (instituions académiques, entreprises, gouvernements) ont promis que celle-ci ne serait pas déployée pour d’autres raisons pour l’instant. Si le « contact tracing » ne permet en fait pas d’identifier où se situe l'individu sur une carte, on pourrait dire que l‘espace n‘est pertinent que dans notre proximité aux autres, et donc que le « fonds architectural et paysagé » de la carte n’importe pas vraiment.

Deux problèmes majeurs existent avec ces données: Premièrement, tout le monde n'y est pas représenté puisque tout le monde n’a pas nécessairement usage de téléphones intelligents. D’autant plus que les personnes qui « n‘existent pas » dans les données appartiennent souvent à des groupes plus vulnérables ou déjà mal représentés dans les données de recensement ou d’enquête: les personnes âgées isolées, les personnes migrantes, les personnes sans domicile fixe, etc. Deuxièmement, ces données sont pour l’instant accessible qu’à une poignées de chercheurs triés sur le carreau et qui développent des partenariats durables avec les entreprises qui produisent ces données. De mon expérience avec Orange et Swisscom pour les données téléphoniques, et avec le consortium du Connexion Science Lab pour les données bancaires, les entreprises sont très frileuses à partagées ces données, et ne le font que dans la mesure où le partage rempli un objectif d’importance pour l‘entreprise (p.ex. Rentabilité, recherche et développement ou social responsibility.

Concernant la mesure en elle-même. Il nous faut, il me semble, considérer deux choses. Tout d’abord, il y a le lieu, et la manière qu’on peut le discrétiser. Puis, il y a l’habité, c’est à dire la valeur qu’on donne à la présence de l‘individu dans le lieu. Il faut ici faire bien attention à la granularité de ces mesures. Par exemple, si on prend le lieu comme les coordonnées géographiques en tout point, on se retrouve avec des lieux complètement dissociés, puisqu’il y a peu de chance que plusieurs personnes se retrouve au même coordonnées durant une journée. De manière inverse, si on prend une aire, comme sur google, on peu prendre le sense de la mesure lorsque des personnes se trouve de part et d‘autre de la frontière entre deux aires. Puis, il faut considérer la mesure d’intensité avec laquelle l’individu habite le lieu. Si on prend une mesure à chaque seconde, les lieux qui sont traversés rapidement par plusieurs personnes sont désavantagés par rapport aux lieux ou peu de personnes restent longtemps. À l’inverse, si on prend comme mesure des temps longs, c’est l’inverse qui se passe, et les lieux comme les autoroutes deviennent soudainement plus « habités » que les places.

Ce qui me ramène au « contact tracing ». Ici, ce n‘est pas le nombre de personne dans un lieu qui compte mais la distance entre les individus et le temps qui s’écoule à chaque distance. En d’autre mots, on pourrait s’inspirer de la manière avec laquelle fonctionne cette technologie pour mesurer le peuplement de lieux. Pour chaque individu 'i', on additionne au temps 't' le nombre d’autres 'a' autour divisés par la distance 'd' à l’individu 'i'.

On inverse quelque peu le problème en mesurant le lieu à chaque moment d’habité.

Figure 1

Dans la Fig. 1, l’individu au centre (i1) est entourée de sept autres individus (a1-a7) au temps t1 et au temps t2. L’intensité d’habité au temps t1 est égal à X1 et à t2 à X2. Le lieu est alors défini comme la somme des X à chaque temps t. Pour l’individu i, un « autre » à une mètre aura une valeur de 1/1 = 1 et un « autre » à 1km aura une valeur de 1/1000, etc. Un lieu peut dont avoir plusieurs valeurs simultanées selon l’individu i à travers laquelle on le mesure. Plus les individus sont proches, plus leur distance aux autres est semblable, et donc, plus leur valeur X équivalente.

n*n-1 en quelque sorte, mais SUM(Xi) = SUM(1/D_{ia_{n}}) où X est la valeur de l‘intensité mesurée comme le rapport de la distance entre l’individu i et l‘autre a.

De cette manière, on peut à la fois étudier l’individu et le lieu du même coup. Un lieu serait alors défini comme un espace où la distance entre les individus n‘est pas pertinente, puisque leur valeur serait quasiment équivalentes (Xi1 = Xi2).

On pourrait même émettre l’hypothèse, suivant l’idée de Thibault sur la topodoxie, que deux individus éloignés l’un de l’autre mais dont la valeur est proche sont en fait dans le même lieu. Ceci permettrait en autre d’expliquer les correspondance d’urbanité entre les villes dont la somme des individus sont « chargés » des même valeurs X élevées. L’habité serait alors défini en terme d’une mesure de nôtres distance relative aux autres à différents moments t.

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