Gare du Monde
Gare du Monde, film de Jacques Lévy
Ce film de 45 minutes est entièrement tourné dans la gare du Nord de Paris. Dans ce lieu massif et compact, des explorateurs curieux frôlent les corps des humains et nous aident à comprendre les mystères de la co-habitation.
Le film raconte comment des chercheurs s’emploient à comprendre ce qu’est la gare du Nord, le plus grand nœud ferroviaire d’Europe, à la fois monde à part et modèle réduit du Monde. Cette gigantesque machine se laisse-t-elle apprivoiser par ceux, voyageurs, travailleurs, passants qui la mettent en mouvement ? Telle est la question que se posent, les chercheurs… qui se trouvent être des danseurs.
Le film relève un double défi : se passer d’une voix-off surplombante, courante dans les documentaires ; viser une rigueur d’exposition et d’argumentation au moins égale à celle d’un essai scientifique. La solution est trouvée par un récit en images, en sons et en gestes qui donne à voir les phases d’observation, de modélisation et de conceptualisation. Dans une combinaison typique de tout travail scientifique entre l’inductif et le déductif, des intuitions émergent en même temps que des hypothèses sont testées.
La difficulté de transmettre au public les résultats obtenus n’épargne pas les chercheurs-danseurs et cela conduit à quelques surprises qui soulignent le rôle essentiel de la médiation. C’est au bout du compte le concept d’habiter qui se trouve labouré et moissonné tant dans la recherche racontée par le film que le film lui-même.
La fiction-science Gare du Monde est un manifeste pour le cinéma scientifique. Après Urbanité/s (2013), la série Thinking Places (2015) et Paris sera un jour Paris (2021), Jacques Lévy démontre par l’exemple comment les langages habituellement dédiés aux mondes de l’art comme le cinéma, la danse contemporaine et la musique contemporaine peuvent aussi devenir des ressources stimulantes pour l’invention scientifique.